Il était là. Sous nos yeux ébahis pendant six beaux mois, ce continent incroyable : l’Amérique du Sud. Et avec lui ses histoires, ses légendes, ses mystères, ses trésors, ses rêves enfiévrés. Jaureguiberry, Buenos Aires, Valparaiso, Potosi, Cuzco, Rio de Janeiro… Autant de noms, d’images, de sons, de couleurs et de souvenirs d’un territoire fascinant où l’Histoire -la grande- n’a cessé de se réécrire au fil de nos péripéties. Où une nouvelle réalité s’est construite pas à pas. En surface, il y a l’Histoire telle qu’on la connait, tous, nourrie par des faits établis et vérifiés. Ce que l’on sait moins, c’est que la fiction -celle des conquérants- s’y est mêlée insidieusement, subtilement pour rendre les traits saillants plus héroïques et les bavures plus acceptables. Ce sont les vainqueurs qui écrivent l’Histoire. Et dans leur langue évidemment.
Cette langue espagnole qui semblait si chantante, si exotique au départ d’Europe n’est sur le continent américain que la langue parlée et imposée par les conquistadors. Certes, on parle toujours Quechua ou Aymaru en Bolivie ou au Pérou mais cela reste marginal. Comme sur l’ensemble des terres américaines, au Nord comme au Sud, l’Histoire du continent débute par le péché originel : un génocide aux proportions inimaginables.
Le génocide amérindien : invisible péché originel
Si les étasuniens ont massacré les Sioux et toutes les tribus d’indiens au nord, les espagnols et les portugais en ont fait autant avec les Incas, les Mapuches et tous les aborigènes qui vivaient avant eux sur cette terre. Un massacre d’une ampleur délirante : 70 millions de morts selon l’historien Tsvetan Todorov. Une tragédie d’autant plus catastrophique qu’elle est invisible, impalpable au premier abord. On ne peut interroger un inca ayant échappé aux massacres, constater la destruction d’une ville ou les conversions religieuses forcées. En revanche, on peut aujourd’hui traverser sans problèmes des avenues du nom de Francisco Pizarro, le meneur sanguinaire des conquistadors, ancien enfant de la misère, devenu autocrate tyrannique et assassin de l’empereur inca Atahualpa. Ne reste plus que le Machu Picchu pour s’extasier du génie inca.
C’est la mémoire des colonisateurs -les seuls encore en vie- qui a forgé notre vision de l’Histoire. C’est ainsi. Mais comment retenir uniquement cette horreur originelle ? Les horreurs ne sont pas l’apanage du XVI ème siècle. L’Histoire post-coloniale du continent le démontre. Les dictatures sanguinaires du XX ème siècle au Chili, en Argentine, en Uruguay, au Brésil, en Bolivie, au Pérou sont encore dans toutes les mémoires. Plus proches, plus palpables que le massacre de millions d’amérindiens.
Il ne s’agit pas de considérer les populations latinos comme des colons avides de sang, racistes et xénophobes, ce serait aussi bête que de nous considérer nous européens comme des trafiquants d’esclaves. D’autant que les sud-américains ont chèrement et fièrement acquis leur indépendance. Mais il est important d’observer ce continent à travers le prisme de son histoire initiale.
L’Histoire, cette grande mytho
De l’autre côté de l’Atlantique, tout notre logiciel d’occidental est à reprogrammer. Pas la peine d’essayer de chercher dans vos souvenirs, cette histoire là n’est pas vraiment mise en valeur en Europe : la guerre contre la drogue, les complaisances des occidentaux avec les plus abjects dirigeants (coucou Pinochet, Videla, Branco…), les pillages organisés des richesses, la corruption, les massacres : le revers de l’Histoire est franchement dégueulasse.
Mais c’est peut être de ces douloureux bagages que les sud-américains tirent leur vitalité et leur soif de vivre. L’irrationnel a une autre saveur ici. La rue est probablement le meilleur poste avancé pour la savourer. Une famille entière sur un scooter (grand-mère incluse) qui slalome entre des chiens errants sans poil sous le regard absent d’un agent de circulation raillé par une bande de vieux amusés, assis comme chaque jour sur leur même banc. Il y a de quoi se réjouir d’un tel bordel.
La vie foisonne ici, elle est visible, bruyante, remuante, chahutante, puante même parfois, mais bien réelle ! Une vision tellement plus enthousiasmante que nos métropoles jumelles parfois si mornes. Si connectées, si riches et pourtant si tristes en comparaison.
Six mois après le départ, nous voici au bout de notre voyage. Un (très, très) grand merci à tous de nous avoir suivi sur Eldoradonews.fr pour la lecture d’un article ou de leur intégralité, peu importe, merci ! Merci à l’ami Théo aussi pour ses magnifiques photos qui ornent la plupart des papiers de ce site.
Qui sait, peut-être que de nouvelles aventures seront écrites ici lors d’un prochain périple ou même avant ! En attendant, vous pouvez retrouver toutes nos photos sur la page Facebook d’Eldoradonews et relire tous les récits sur le site.